CPAM DENTISTE DISCRIMINATION
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CPAM et contrat d'aide à l'installation
- Par isabelle raygade
- Le 08/12/2021
Afin d’inciter certaines professions médicales ou paramédicales, telles que les chirurgiens-dentistes, à s’installer dans des déserts médicaux (appelées zones sous dotées ou très sous dotées) la CPAM a mis en place des contrats d’aide à l’installation.
En pratique, le professionnel reçoit une aide financière et s’engage, en contrepartie, à exercer durant un certain nombre d’années dans la zone en question. Le contrat stipule plus précisément l’obligation de « justifier d’une activité libérale réalisée à titre principal auprès de patients résidant dans la zone très sous dotée ».
Se fondant sur ces dispositions, la CPAM a exigé, à des professionnels de santé, le remboursement de l’aide prétextant le non-respect de leurs obligations. En effet, elle soutenait que moins de la moitié des patients pris en charge résideraient dans la zone géographique définie.
Comme tout professionnel nouvellement installés ces chirurgiens-dentistes recevaient de nombreuses demandes de rendez-vous émanant de patients habitant parfois à plusieurs dizaines de kilomètres. Il s’agit de la réalité des déserts médicaux dans lesquels les professionnels sont submergés de demandes, ne prennent pas de nouveaux patients, continuent de travailler 2 ou 3 jours par semaines malgré leur retraite. C’est pourquoi pour appliquer cette obligation contractuelle, le professionnel devrait accepter ou non d’intervenir sur le seul critère du lieu d’habitation du patient.
Il s’agit alors d’une discrimination.
Le principe de non-discrimination désigne l’interdiction de traiter moins favorablement une personne en raison de critères, réels ou supposés, tels que l’apparence, la croyance, l’âge ou le sexe. Il est notamment protégé par l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 et l’article 14 de la Convention Européenne des droits de l’Homme. Ce principe est repris dans le code de la santé publique et dans le code pénal qui interdit toute discrimination fondée notamment « sur le lieu de résidence ». Cette disposition du contrat est bien entendu contraire également aux principes déontologiques des professions médicales et paramédicales.
Le cabinet a donc fait un recours contre la décision de la CPAM exigeant le remboursement de l’aide à l’installation. Le Pôle social du Tribunal Judiciaire, suivant l'argumentation de mon associée Me Estelle LALANDE, a considéré discriminatoire et illicite la clause précitée et l’a déclarée non écrite. Cela signifie qu’elle ne peut être appliquée, la CPAM a donc été déboutée de sa demande de remboursement.
Nous espérons que la décision fera jurisprudence et incitera la CPAM à modifier ses contrats afin de les rendre conformes à la Constitution.
La lutte contre les discriminations est un travail du quotidien et nous sommes fières de participer à celle-ci.